La directive européenne NFRD (Non Financial Reporting Directive) qui encadre aujourd’hui les déclarations de performance extra-financière des sociétés européennes sera remplacée par une nouvelle directive, plus ambitieuse : la directive CSRD qui s’appliquera progressivement à compter du 1er janvier 2024.

Principales dispositions de la directive CSRD

Le renforcement des exigences de reporting de durabilité des sociétés est un élément clé du Pacte Vert pour l’Europe. L’objectif principal de la CSRD est d’harmoniser le reporting de durabilité des entreprises et d’améliorer la disponibilité et la qualité des données ESG publiées. Ces évolutions permettront par exemple de répondre aux besoins d’information des acteurs financiers, eux-mêmes soumis à des obligations de reporting ESG.

La CSRD modifie quatre textes européens existants : la directive Comptable, la directive Transparence, la directive Audit et le règlement Audit.

Les principaux changements introduits en comparaison de la directive NFRD de 2014 sur la publication d’informations non financières sont :

  • Un champ d’application élargi : un nombre plus important de sociétés seront concernées par les obligations de reporting et en particulier toutes les sociétés (sauf micro-entreprises) cotées sur les marchés réglementés européens.
  • Un renforcement et une standardisation des obligations de reporting : les sociétés devront publier des informations détaillées sur leurs risques, opportunités et impacts matériels en lien avec les questions sociales, environnementales et de gouvernance,
  • Une localisation unique : le reporting de durabilité sera publié dans une section dédiée du rapport de gestion.
  • Un format digital imposé : le rapport de gestion sera publié dans un format électronique unique européen xHTML.
  • Une vérification obligatoire de l’information par un commissaire aux comptes ou un organisme tiers indépendant (au choix des Etats) : dans un premier temps avec un niveau d’assurance « modérée ». Un passage au niveau d’assurance « raisonnable » pourrait être requis à compter de 2028.

La CSRD prévoit la création de normes de reporting de durabilité détaillée, dites normes « ESRS » (European Sustainability Reporting Standards) permettant d’encadrer et d’harmoniser les publications des sociétés. Ces normes, progressivement adoptées par voie d’actes délégués, sont de plusieurs types :

  • Des normes universelles : applicables à l’ensemble des sociétés quel que soit leur secteur d’activité. Elles couvrent les enjeux transversaux ainsi que l’ensemble des thématiques socio-environnementales.
  • Des normes sectorielles : elles feront l’objet d’un second acte délégué dont l’adoption est prévue en juin 2024.
  • Des normes spécifiques : pour les PME cotées sur les marchés règlementés prévues dans l’acte délégué de juin 2024.

 

Sociétés concernées par les nouvelles obligations de reporting

L’obligation de publier un reporting de durabilité en application de la CSRD s’applique de manière progressive.

Elle concerne les sociétés financières et non-financières dans le champ d’application de la directive Comptable et de la directive Transparence et qui correspondent aux catégories suivantes :

  • Toutes les sociétés cotées sur les marchés règlementés européens, à l’exception des microentreprises telles que définies par la directive Comptable. Sont donc concernées les PMEs cotées. Toutefois, les PME bénéficient d’obligations de reporting allégées (normes spécifiques).
  • Toutes les autres grandes entreprises européennes, c’est-à-dire, selon la directive Comptable, les sociétés, cotées ou non, au-dessus de deux des trois seuils suivants : 250 salariés ; 40 M€ de chiffre d’affaires et 20 M€ de total de bilan.
  • Par le biais de leur(s) filiale(s) ou succursale(s) européenne(s), certaines sociétés non-européennes pour autant que leur chiffre d’affaires réalisé dans l’UE soit supérieur à 150 M€. Toutefois, ces sociétés non-européennes doivent uniquement fournir des informations relatives à leurs impacts socio-environnementaux (et non celles liées à leurs risques et opportunités).

Lorsqu’un reporting de durabilité consolidée est établi par la société mère d’un groupe, les sociétés filiales peuvent bénéficier d’une exemption de reporting. Des informations minimales sont toutefois à fournir par la filiale exemptée. Cette exemption ne s’applique pas aux grandes sociétés cotées.

 

La directive CSRD et les standards de reporting : ce qui change

Dès 2024, de nouvelles obligations de reporting de durabilité plus exigeante avec la directive CSRD

La directive européenne CSRD vise à harmoniser les reportings de durabilité des entreprises et à améliorer la disponibilité et la qualité des données publiées. Un grand nombre d’entreprises devront ainsi suivre des normes européennes de reporting de durabilité obligatoire et publier des informations détaillées sur leurs risques, opportunités et impacts matériels en lien avec les questions sociales, environnementales et de gouvernance.

Comment se préparer aux obligations CSRD
  • Analyser les textes, développer l’expertise

La nouveauté, la complexité et la densité des nouvelles obligations introduites par la CSRD et les ESRS, exigent une étude approfondie des textes, qui constituent l’étape essentielle dans leur mise en œuvre.

Il est impératif d’appréhender les « sous-jacents » de la durabilité, c’est-à-dire les enjeux de chaque thématique E (environnementale), S (sociale) et G (de gouvernance) couverte par les standards.

Une expertise doit donc se développer au sein de l’entreprise sur les différentes thématiques de durabilité et les normes liées.

  • Travailler en mode « projet » en impliquant toutes les fonctions de l’entreprise

Tous les métiers et toutes les fonctions de l’entreprise sont concernés par la durabilité, que ce soit pour l’identification des risques, impacts et opportunités liés, ou la définition, la mise en œuvre et le suivi de la stratégie, des politiques et des actions de durabilité de l’entreprise.

De façon similaire, le reporting de durabilité découlant de ces éléments mobilisera différentes compétences (financière, juridique, opérationnelle, développement durable, ressources humaines, communication, affaires publiques, etc.) au sein des organisations.

Une organisation transversale, intégrant l’ensemble des parties prenantes internes et associant la direction de l’entreprise, constitue donc un facteur clé de succès dans la mise en œuvre de ce nouveau cadre réglementaire.

  • Adapter les outils de collecte et de construction des données

Les normes de durabilité comprennent un nombre important d’obligations d’informations et de points de données qualitatives ou quantitatives à fournir.

Selon l’organisation des sociétés, leurs enjeux ESG et la matérialité de ces enjeux, certaines obligations d’information seront totalement nouvelles et nécessiteront des données à construire. D’autres obligations d’informations couvriront des données partiellement existantes et donc à compléter ou à fiabiliser. Certaines informations requises par les normes concerneront par ailleurs la chaîne de valeur de l’entreprise.

La constitution, la collecte et la fiabilisation des données sont donc également importantes à anticiper et adresser, ces questions pouvant impliquer une adaptation plus ou moins conséquente des outils et des canaux de reporting ou un changement organisationnel.

  • Se doter d’un contrôle interne robuste du reporting de durabilité

La directive CSRD requiert que le reporting de durabilité des entreprises fasse l’objet d’une vérification obligatoire par un commissaire aux comptes ou un organisme tiers indépendant.

La directive étend également la responsabilité des organes de gouvernance, qui doivent veiller collectivement à la conformité du reporting de durabilité à la directive CSRD, aux normes ESRS et aux dispositions de l’article 8 du règlement Taxonomie.

Enfin, le texte élargit les prérogatives du comité d’audit, qui doit contribuer à l’intégrité de l’information en matière de durabilité (ce nouveau rôle dévolu au comité d’audit peut être assigné, au choix des Etats, à un autre organe). Ces nouvelles responsabilités visent à renforcer la qualité et la fiabilité du reporting de durabilité.

Ainsi, un contrôle interne robuste et une forte implication des organes de gouvernance constitueront sans doute des atouts dans le processus de mise en œuvre de CSRD et des ESRS au sein des entreprises. En outre, un dialogue étroit avec le(s) commissaire(s) aux comptes ou l’organisme tiers indépendant, dès le début et tout au long du processus de production et de contrôle du reporting, peut être bénéfique aux entreprises.

Quelles priorités dans la mise en œuvre du nouveau reporting

  • Mettre en œuvre ou mettre à jour l’analyse de double matérialité

Avec le principe de « double matérialité » les entreprises doivent publier des informations nécessaires pour comprendre d’une part les effets des enjeux de durabilité sur leur situation et performance financières, et d’autre part leurs impacts sur l’environnement et la société.

L’analyse de double matérialité menée par les sociétés doit permettre d’identifier les thématiques de durabilité reflétant les principaux risques, opportunités et impacts ESG de l’entreprise liés à ses activités et à sa chaîne de valeur. Cette analyse doit permettre également de relever les informations matérielles pour rendre compte de ces enjeux (indicateurs, informations contextuelles, etc.) en application des normes ESRS.

L’analyse de matérialité étant le point de départ du reporting de durabilité, les entreprises gagneront à mettre à jour et/ou à mettre en œuvre rapidement leur processus d’évaluation de matérialité.

Les entreprises pourront se référer utilement au futur guide sur « l’analyse de matérialité », en cours d’élaboration par l’EFRAG (Groupe consultatif européen sur l’information financière, en anglais, est une association internationale sans but lucratif qui a été créée en 2001 avec les encouragements de la Commission Européenne afin de servir l’intérêt général).

En matière de transparence, la description claire par les entreprises de leur démarche d’analyse de matérialité sera importante en particulier pour les premiers exercices de reporting.

  • Analyser l’écart entre les informations publiées aujourd’hui et les obligations de reporting

En parallèle de l’analyse de double matérialité, l’exercice de priorisation peut être utilement complété par une analyse comparée entre les futures obligations de transparence des ESRS et les informations déjà publiées par les entreprises en matière de durabilité.

Cette étape d’analyse d’écarts donnera une vision globale des marches à franchir, qui peuvent être très importantes, sur les informations à reporter au titre des différentes thématiques et sous-thématiques de durabilité matérielles.

  • Définir les priorités dans la préparation des informations

L’analyse de matérialité et l’analyse d’écarts permettront de prioriser les informations pertinentes à préparer.

Sur la base du projet d’acte délégué de la Commission, les informations générales requises par le projet de norme ESRS 2 ne sont pas soumises à un principe de matérialité, contrairement aux informations des autres normes thématiques qui sont à fournir, si les sujets de durabilité qu’elles couvrent, sont matériels selon l’analyse de matérialité réalisée par chaque entreprise. Les entreprises devront inscrire dans leurs priorités la préparation des obligations d’informations d’ESRS 2 pour s’assurer de leur publication effective.

Un second filtre consiste à identifier les mesures transitoires prévues pour certaines normes et obligations d’information (qui peuvent temporairement ne pas être fournies). Il s’agit de mesures introduites par la Commission pour faciliter l’application par les entreprises de ce nouveau cadre de transparence exigeant.

A noter que dans le projet d’acte délégué du 9 juin 2023, la Commission a introduit davantage de points de données optionnels que dans les projets de standards préparés par l’EFRAG.

 

Le label B-CORP (Pour Benefit Corporation)

Lancé en 2006 aux Etats-Unis, le LABEL B-CORP certifie des entreprises avec un impact sociétal et environnemental positif.

Actuellement plus de 2 600 entreprises sont certifiées dans plus de 60 pays et 150 secteurs différents.

La communauté B Corp a été fondée en 2006 aux États-Unis, avec l’intention de « faire évoluer le capitalisme » et repenser la notion de succès dans les affaires.

L’initiative part du constat que les défis actuels ne peuvent pas être résolus uniquement par les gouvernements et les organisations non-lucratives. Le monde des affaires a également un rôle déterminant à jouer.

Il s’agit de mettre les performances des entreprises au service de l’intérêt général. Les objectifs affichés de la communauté B Corp sont de réduire les inégalités, réduire la pauvreté, assurer un environnement plus sain, rendre les communautés plus résilientes et créer des emplois de meilleure qualité.

Le slogan B-Corp est : « Ne pas chercher à être la meilleure entreprise du monde, mais à être la meilleure pour le monde ».

Le label « B Corp », certification octroyée par l’ONG indépendante B-Lab, est octroyé à des sociétés commerciales à but lucratif qui se fixent des objectifs extra financiers sociaux ou environnementaux et qui répondent à des critères exigeants en matière de responsabilité et de transparence. Tous les trois ans, les entreprises sont réévaluées, et sont donc encouragées à améliorer leurs performances (ce que la plupart parviennent à faire). Le label est encore peu connu en Europe.